LEVOLUTION DE LACTION PUBLIQUE AU
CAMEROUN :
lémergence de lEtat régulateur
par Auguste Nguelieutou
Université de Douala
Introduction
La redécouverte de linstitutionnalisation et des institutions constitue le point de
départ dune relecture du politique ; elle conduit inévitablement à une nouvelle
interrogation sur le rôle du politique dans les institutions et rend plus urgent un
approfondissement de la nature et de la spécificité éventuelle de la régulation
politique (Commaille & Jobert , 1998 : 11-32).
LÉtat devient de plus en plus le siège de profondes mutations, lesquelles
engendrent dimportantes réorientations des pratiques de gouvernementalité2.
Certains auteurs en tirent lidée dun évidement de lÉtat (Offe, 1979 :
47), de sa fragmentation, de sa dilution et de son retrait ; ces remises en cause
multiples de lÉtat sont de plus en plus reliées aux transformations des politiques
publiques en général et à leur tournant néolibéral en particulier (Jobert, 1994). La
perspective de Jobert sapplique à lEtat en France qui est le prototype de
lEtat fort et pose la problématique du transfert de modèle dans un contexte
camerounais caractérisé par lexistence dun Etat faible. LEtat en
France est laboutissement dun lent mouvement dextension des structures
et des prérogatives de lordre politique amorcées avec le basculement de la
féodalité vers la modernité. LEtat au Cameroun en revanche, relève dun
legs colonial. Malgré ces trajectoires nationales particulières, lapproche en
termes de régulation fait sens au Cameroun du moment où il faut comprendre lEtat
au Cameroun non par rapport aux dynamiques exogènes, mais par rapport à la société
dans laquelle il sinsère. Sur cette base, lEtat au Cameroun est un Etat qui
revendique avec succès le monopole de la coercition légitime, qui contrôle et domine la
société.
LÉtat régulateur se construit sur les ruines de lÉtat producteur au
Cameroun. En effet, les limites des formes traditionnelles daction étatique
deviennent évidentes dès la fin des années 1980 ; celles-ci ont conduit à ancrer la
croyance selon laquelle le véritable rôle de lÉtat dans léconomie
nest pas celui dun acteur mais quil lui appartient de fixer les règles
du jeu et den assurer le respect. Dans le même temps, la tendance internationale en
faveur de la dérégulation et dun recours grandissant aux mécanismes du marché
pour réaliser les objectifs du secteur public est très claire. Lenjeu étant ici
celui du renouvellement de la conception du rôle de lÉtat : lÉtat est
appelé à revoir en profondeur ses modes dadministration et dorganisation.
Désormais, il sagit de faire valoir le principe du moins dÉtat, mais mieux
dÉtat, le principe de lÉtat régulateur.
Giandomenico Majone, voit dans le déclin de la propriété publique comme mode
traditionnel de gouvernance, un changement de paradigme de lÉtat positif ou
interventionniste vers lÉtat régulateur (Majone, 1997 : 139-167). Sous la pression
des développements technologiques, idéologiques et économiques, les modes traditionnels
dintervention et de contrôle gouvernementaux ont été démantelés et ce, en
faveur de nouvelles formes dintervention publique. Il y a une évolution du rôle de
lÉtat : de producteur de biens et de services, lÉtat devient régulateur et
sa fonction principale est dassurer que les acteurs économiques jouent bien le jeu
selon les règles établies.
Il semble dès lors opportun de savoir comment le passage de la propriété publique à la
régulation publique a eu lieu. Autrement dit, comment sopère la transition vers
lÉtat régulateur au Cameroun ? Quelles en sont les conséquences ? Notre argument
est que le néolibéralisme promu au nom du retrait de lÉtat signifie moins la mort
de celui-ci, quun nouveau style daction publique (Jobert, 1994). Moins
quun déclin du rôle de Léviathan, il est question dune transformation de
ses modes daction, de ses stratégies. LÉtat régulateur au Cameroun rompt
avec linterventionnisme et le dirigisme tous azimuts qui ont été la marque de
lÉtat-providence des années antérieures.
Létude sur lEtat régulateur prend en compte les actions des acteurs, leurs
interactions et le sens quils leur donnent, mais aussi les institutions, les normes,
les procédures qui gouvernent lensemble de ces interactions, ainsi que les
représentations collectives. Nous sommes en présence de ce que Peter Hall a appelé les
« 3 I » qui prend en compte les intérêts, les institutions et les idées. Cest
dire que la perspective méthodologique envisagée est dinspiration
néo-institutionnaliste dans ses trois variables que sont le néo-institutionnalisme
sociologique, le néo-institutionnalisme historique et le néo-institutionnalisme des
choix rationnels. Le présent article a pour objet de contribuer à la compréhension de
la transformation de lÉtat au Cameroun, en interrogeant le rôle de multiples
acteurs, étatiques et non étatiques, qui peuplent aujourdhui lensemble des
secteurs daction publique sur le double plan économique et politique.
I - La redéfinition du profil de lÉtat : État comme arbitre du jeu
économique
Régulation ou re-régulation des services et infrastructures publiques dans le nouveau
contexte de libéralisation au Cameroun ? Quoi quil en soit, la régulation acquiert
de plus en plus de densité dans la définition des politiques publiques au Cameroun : les
secteurs de lénergie avec la Société nationale délectricité (SONEL), de
leau avec la Société nationale des eaux du Cameroun (SNEC), des transports
aériens avec la Cameroon Airlines (CAMAIR) ou ferroviaire avec la Régie des chemins de
fer du Cameroun (REGIFERCAM), des télécommunications avec la Cameroun
Télécommunications (CAMTEL), des complexes agro-industriels (HEVECAM, CDC, SODECOTON3),
sont autant dexemples de secteurs ou de réseaux industriels qui, au Cameroun,
étaient traditionnellement propriété ou monopole exclusifs de lÉtat et qui, en
respect des conditionnalités du Programme dAjustement Structurel (PAS) sont admis
à la procédure de privatisation. LÉtat autrefois producteur de biens et de
services, devient régulateur neutre des processus de marché : quest-ce quun
État régulateur ? Quels sont ses modes opératoires ? Comment lÉtat camerounais
régule-t-il le secteur économique ?
A - Cadrage sémantique de lexpression « État régulateur »
Le débat sur lÉtat et sa transformation constitue une des interrogations
principales de la sociologie de laction publique, voire de la sociologie de
lÉtat. Si les discours annonçant la fin de lÉtat ont une certaine histoire
(Marx et la thèse du dépérissement de lÉtat par exemple), ils ont
aujourdhui acquis une nouvelle vigueur. Quils traitent de la fragmentation
interne et de la différenciation de lÉtat ou bien des effets de la globalisation,
maints auteurs prennent au sérieux lhypothèse du déclin de lÉtat. Les
titres douvrages et darticles sont éloquents : The Dismantling State, The
Virtual State, The Retreating State (Strange, 1996), The Hollowing out of the State, the
Desétatisation Process (Jessob, 1994), LÉtat en miettes (Dupuy & Thoenig,
1985). En revanche, les formules que lon trouve plutôt dans la littérature
française comme « lÉtat stratège », « lÉtat animateur » ou « État
régulateur », visent à suggérer de nouvelles formes daction de lÉtat.
Demblée, il convient de noter que la formule même de l« État régulateur
» comporte de telles équivoques quon ne saurait y recourir sans quait été
au préalable opéré un indispensable travail de clarification. En termes généraux, la
régulation renvoie à la relation entre lEtat et le marché. Même si cette
question est centrale en science politique, les études sur la régulation sont difficiles
à catégoriser. Cette difficulté est liée à la grande diversité des usages du terme
régulation dans la littérature et aux imprécisions de traduction entre langlais
et le français. LEcole française de la régulation a peu en commun avec les
approches anglo-saxonnes de la régulation, qui sont parfois regroupées sous le terme «
réglementation » pour les distinguer.
Conçue ainsi, létude de la régulation renvoie à une sociologie de lÉtat
qui cherche à caractériser le rôle, les transformations de lÉtat et les régimes
de gouvernance politique. Elle correspond à une réduction de lintervention du
gouvernement dans la fourniture des services publics et à une démultiplication du nombre
dacteurs. Dans cette optique minimaliste, qui est celle des programmes
dajustement structurel mis en place dès les années quatre-vingt-dix,
lintérêt est recentré sur les seules institutions effectuant les fonctions
régaliennes de lÉtat garantie de la propriété, de la monnaie et des
transactions (Quantin, 2005 : 18).
Tout compte fait, les acceptions du terme de « régulation » sont innombrables4. Le seul
point commun entre toutes étant que cette notion suppose la restriction du choix (privé)
par limposition de règles (publiques). Une analyse approfondie relève un clivage
entre une acception européenne plus large et une approche américaine plus stricte de la
régulation.
Pour de nombreux experts européens, la régulation, en termes de fabrication de règles,
ressortit à un éventail très large dactivités gouvernementales, voire même à
lentière élaboration de la gouvernance. En Europe, il y a une tendance à
identifier la régulation avec lensemble du domaine de la législation, le pilotage
macroéconomique et le contrôle social (Majone, 1994 : 233-271). Une acception aussi
vaste conduit à assimiler létude de la régulation à lensemble du droit, de
la science politique et de la sociologie et constitue un obstacle à la construction
dune théorie de la régulation comme un mode particulier dopération des
politiques publiques.
Selon Robert Boyert, par exemple, la régulation correspond à lensemble des règles
gouvernant les modes de production capitaliste. Sur des bases théoriques différentes,
Dyson propose une définition aussi large du terme lorsquil parle du quadruple
caractère de la régulation : la régulation comme phénomène culturel
(cest-à-dire les conceptions du rôle de lÉtat dans léconomie et dans
la société), comme un mécanisme formel, inhérent à linstitution (« régulateur
expert »), comme un processus politique et de coalition et, enfin, comme un processus
dapprentissage. Hancher et Moran utilisent le concept d« espace régulateur
» dont les contours sont fondamentalement définis par les interactions entre les grandes
organisations publiques et privées dans les économies capitalistes avancées.
Dans le contexte américain, la régulation a acquis une signification plus spécifique,
et y est mieux développée. La régulation au sens américain, sapplique au
contrôle public exercé sur les activités économiques du secteur privé au nom de
lintérêt public. La régulation comme forme distincte de contrôle gouvernemental,
suppose en principe un organisme gouvernemental ayant charge dédicter des règles
contraignantes sur un certain nombre de décisions économiques (privées) au moyen de
procédures administratives quasi juridiques (Noll, 1985 : 9-63). La régulation renvoie
à « un contrôle attentif et soutenu exercé par une instance publique sur des
activités généralement considérées comme désirables par la société (Selznick, 1985
: 363-367) ». Cette définition a lavantage de rendre explicite lun des
traits déterminants du style américain de réglementation : le contrôle attentif et
soutenu de lautorité publique. Cette caractéristique implique que la
réglementation ne consiste pas seulement à promulguer une loi mais exige un savoir
détaillé sur lactivité réglementée et une implication intime de
lautorité publique dans son fonctionnement. Aussi bien ladoption de la
réglementation comme mode daction publique implique tôt ou tard, la création
dinstances et de commissions spécialisées capables de sinformer, de fixer et
de mettre en service des règles. Si en Europe cette régulation à laméricaine a
fait figure de modèle notamment à travers la création des « regulatory offices » en
Grande-Bretagne et des « autorités administratives indépendantes » en France, il faut
souligner que ce type de régulation, si ce nest la régulation elle-même est un
phénomène nouveau au Cameroun. Sans doute, lexpérience américaine de la
régulation a aussi fourni un bon point de départ pour une réflexion sur les facteurs
institutionnels qui conditionnent le processus de régulation au Cameroun.
En somme, lÉtat régulateur renvoie en effet à deux évolutions interdépendantes
des politiques publiques. La première est le passage progressif du faire au faire-faire :
lÉtat régulateur est un État qui agit plus indirectement que directement, qui est
plus en interaction quen action, qui délègue plus quil nintervient
directement, qui pilote et qui oriente plus quil ne met en uvre. La seconde
évolution, qui découle de la première, est le renforcement des capacités de contrôle
étatique à travers le développement de laudit, de lévaluation, du
benchmarking, du contrôle de qualité, en particulier dans le cadre des agences
(Hassenteufel, 2007 : 311-329).
En effet, la transition vers une économie de marché sest traduite au Cameroun -
pays très étatiste à linstar de la France par la libéralisation des
échanges commerciaux et du processus de fixation des prix, la suppression des
restrictions quantitatives à limportation, la recherche de lefficience
économique à travers le programme dajustement structurel. Le point de rupture, le
repère du désengagement étatique ont été marqués par la création des organismes de
régulation dans certains secteurs de léconomie nationale. Il ne sagit pas
dune rupture au sens de la révolution tant la dépendance au sentier (path
dependance) demeure prégnante : les anciennes institutions structurent toujours les
règles du jeu politique, les modes de pensée et daction des citoyens. Certes, Il y
a une continuité institutionnelle, mais qui accorde plus dimportance au changement
intra-institutionnel (layering). Les nouvelles institutions créées (les agences de
régulation notamment) sont considérées comme ajoutant leur marque à
larchitecture institutionnelle déjà existante. Cela signifie quil y a
innovation, mais que celle-ci est affectée par les formes existantes sur lesquelles elle
se superpose (Thelen, 2003 : 226).
B - La mise en place des organismes de régulation : un nouveau mode
daction étatique
Au lendemain de leurs indépendances, la plupart des États africains ont connu un
accroissement considérable de leur poids dans la société, compte tenu notamment du
développement de lÉtat-providence (Le Galès, 1999). Le but recherché étant
celui détendre lemprise de lÉtat sur lespace national et aussi
dinstaurer lÉtat-providence moderne. Les décennies daprès
apparaissent comme une espèce dâge dor de « lÉtat keynésien
modernisateur » où, dans un contexte de croissance économique, lintervention de
lÉtat saccroît et se différencie dans des secteurs de plus en plus divers
et compliqués - éducation, santé, sécurité du travail, protection du consommateur -
(Rose & Davies, 1994). LÉtat est conçu comme un État propulsif (Morand, 1991)
prenant en charge le développement économique et social. Au Cameroun comme ailleurs, le
grand dessein politique est le « développement » : ici la domination politique rime
avec pouvoir économique, du moins lélite politique doit assurer
lexploitation économique ou, tout au moins lintégration de la
main-duvre aux mécanismes dexploitation. Le discours politique est
avant tout un discours de mise au travail. LÉtat est présent dans tous les
secteurs ; il assure la prise en charge des secteurs économiques stratégiques
(hydrocarbures, énergie, transports
) par les investissements directs. Dans le
secteur agricole, lÉtat postcolonial promeut le financement du processus
daccumulation du capital par la paysannerie, soit 80 % de la population. Les
cultures dexportation (café, cacao, coton
) constituent un élément central
du dispositif, lÉtat sen étant arrogé la maîtrise des circuits commerciaux
souvent à travers des offices de commercialisation et la détermination du niveau des
prix (Bayart, 1984 : 244).
Au Cameroun, lÉtat des années soixante, voire soixante-dix apparaît
rétrospectivement pendant cette période comme légitime, innovateur, contrôlant le
marché dans un contexte doptimisme et de foi dans le progrès. Cette extension du
rôle de lÉtat était assez largement acceptée ne serait-ce que parce quelle
a coïncidé avec une amélioration importante des conditions des populations et une
période de paix. Désormais, lheure est à la construction de la thèse de la
défaillance de lÉtat, défaillance attribuée à la structure du système
politico-bureaucratique (Gronnegard Chritensen, 1998 : 45-76) et, conséquemment, à la
montée en puissance de lÉtat régulateur, synonyme de rupture davec
lÉtat providence. La conception volontariste dun État investi de la mission
et doté de la capacité dordonner le développement économique na pas
résisté au nouveau contexte résultant de la mondialisation (Chevallier, 2004 : 481).
Toutefois, lÉtat reste présent dans léconomie mais de manière différente
; il ne se pose plus en acteur mais en arbitre du jeu économique, en se bornant à poser
des règles aux opérateurs et en sefforçant dharmoniser leurs actions. La
fonction de régulation du jeu économique impartie à lÉtat aurait donc entraîné
une modification de larchitecture étatique traduite par la mise en place
dorganismes régulateurs.
La fin du monopole étatique dans la régulation économique et sociale se traduit par la
mise en place de nouvelles règles et agences de régulation à la fin des années 1990 :
il sagit de la Commission nationale de la Concurrence et des organismes régulateurs
sectoriels. Ce sont lagence de régulation des télécommunications (ART), dans le
domaine des télécommunications, de lAgence de régulation du secteur de
lélectricité (ARSEL) dans le domaine de lénergie, lAgence de
régulation des marchés publics (ARMT) dans le domaine des travaux publics, la création
dune autorité de la concurrence dénommée Commission nationale de la Concurrence.
En effet, si la crise financière limite les actions publiques qui engendreraient un
surcroît de prélèvements obligatoires, elle ninterdit pas à lautorité
politique de fixer des normes aux acteurs marchands et non marchands (Jobert, 1996 :
315-328). Le trait distinctif de ces nouvelles réglementations tient à ce quelles
visent moins à réprimer des fautes quà fournir un cadre daction à des
activités socialement désirables. Elles débouchent sur des formes dinstances plus
ou moins autonomes. Ces instances et commissions régulatrices sont calquées sur le
modèle des « autorités administratives indépendantes » françaises, des « regulatory
offices » britanniques ou des agences spécialisées des communautés. Les objectifs tels
que stipulés par les textes sont plutôt vagues et standardisés se résumant pour
lessentiel en un mélange dobjectifs pro-concurrentiels et de corrections du
marché (promouvoir la libre concurrence et/ou la participation de linitiative
privée).
Ces nouvelles agences sont-elles pour autant le signe du retrait de lÉtat au profit
des experts ? En sintéressant au potentiel opératoire de ces organes régulateurs,
force est de constater que ceux-ci soulèvent des questions qui sont de nature à
alimenter le doute tant sur leur indépendance ou statut que sur létendue de leurs
pouvoirs.
La question de lindépendance dabord. Toutes les instances régulatrices sont
sous tutelles ministérielles. La commission nationale de la concurrence (CNC) relève du
ministère du commerce, lARSEL est placée sous la tutelle du ministère de
leau et de lénergie, lART relève du ministère des postes et
télécommunications. Bien plus si lindépendance des agences de régulation est
reconnue sur le principe, son application pose problème. De fait, il est difficile
dimaginer lune de ces instances indépendantes des pouvoirs publics. La
permanence des liens de dépendance vis-à-vis de lautorité politique est davantage
perceptible dans le secteur de la concurrence. Depuis la promulgation de la loi portant
création dune commission nationale de la concurrence le 14 juillet 1998 (Loi n°
98/013 du 147 juillet 1998), ce nest quen mai 2005 quinterviendra son
texte dorganisation et de fonctionnement (Décret n° 2005/1363/PM). Cette autorité
jusquà nos jours nest pas encore opérationnelle et fonctionne par
délégation. Ses compétences sont assumées par le ministère du commerce qui assure en
plus la tutelle. Une telle situation rend impossible la neutralité dune autorité
textuellement existante, mais de fait gérée par procuration. Ces interférences des
pouvoirs publics nous inclinent à conclure à une laborieuse immersion dans un paysage
politico-économique ouvert à la concurrence.
Les ressources financières des agences sectorielles proviennent essentiellement des
redevances perçues sur le chiffre daffaires des opérateurs exerçant dans leurs
secteurs de compétence5. Elles en sont donc largement dépendantes et sopposent
souvent à des actions pouvant gêner les activités de ces opérateurs, même si ces
actions sont menées par lautorité nationale de la concurrence dans le cadre de la
lutte contre les pratiques anticoncurrentielles. Dans de telles conditions, il est
difficile pour ces régulateurs dassumer leur mission en toute neutralité.
La deuxième préoccupation porte sur létendue des pouvoirs des agents régulateurs
dans une situation de non-concurrence ou de monopole.
Dans le cadre du processus de privatisation engagé par lÉtat camerounais sur
recommandation de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international, il sest
davantage agi dun transfert de monopole étatique au secteur privé que dune
véritable ouverture de secteurs dactivité à la concurrence, soutiennent certains
économistes. Un nombre non négligeable de secteurs déconomie demeurent non
concernés par la concurrence : ce sont des secteurs de chemin de fer, de leau, de
la cimenterie où il nexiste pas dagents régulateurs. En dehors du secteur
des télécommunications où plusieurs opérateurs économiques se partagent le marché
(les sociétés de téléphonie mobile SCM, MTN et Camtel Mobile), les autres secteurs
héritent dun monopole. Il en est ainsi du secteur de lénergie où la
société nationale délectricité du Cameroun devenue Aes-Sonel, bénéficie du
droit dajuster de manière unilatérale ses tarifs de 10 % tous les trimestres en
contrepartie des investissements6.
Ces contradictions permettent de comprendre le jeu de rôle et les enjeux qui travaillent
la structuration et lorganisation des tâches de régulation, et amènent à
sinterroger sur la capacité réelle de lARSEL à remplir pleinement ses
missions. Bien plus, le contrat de cession conclut entre lAes-Sonel et lÉtat
Camerounais prévoit dès juillet 2001 date de signature dudit contrat une série
daugmentations du coût délectricité sur une période de cinq ans en même
temps quil maintient ce secteur sous monopole jusquen 2006. Toutes clauses qui
obèrent considérablement le potentiel daffirmation de lARSEL en tant
quorgane régulateur. Dès lors, le régulateur est réduit à un rôle
dobservateur passif, incapable dinfléchir le cours des événements déjà
programmés par un opérateur soucieux de rentabiliser les investissements quil doit
réaliser dans le cadre du contrat qui le lie à lÉtat.
Une autre lacune de ces autorités tient aux difficultés éprouvées par ces dernières
dont on attend manifestement plus quelles ne peuvent apporter en raison de la
faiblesse générale de leurs moyens (Du Bois de Gaudusson, 2003 : 66-76). Le déficit est
particulièrement sensible pour certaines dentre elles au regard de
limportance parfois démesurée de leurs attributions. Cest le cas de
lARSEL qui doit assurer « la régulation et le contrôle du secteur de
lélectricité » sans moyens conséquents pour un régulateur ou un arbitre qui est
appelé à jouer un rôle dimpartialité, de neutralité et déquité.
Si le lien entre État régulateur et diffusion de la logique du marché est net, il
nen reste pas moins que ces nouvelles agences peuvent aussi permettre la défense du
consommateur face aux entreprises, celle du citoyen face aux institutions publiques et
privées et être porteuses de normes opposées au marché ; ceci pourrait bien expliquer
la création à linitiative de lARSEL du comité consultatif de consommateurs
délectricité dont lobjet est dassurer la participation des
consommateurs au suivi de la marche du secteur de lélectricité. (Ce dernier joue
un rôle de figurant daprès ses membres car est confiné au statut
daccompagnateur des décisions déjà prises par lARSEL).
La recomposition de lÉtat se manifeste par une externalisation de certaines
fonctions précédemment assurées par lappareil de lÉtat peut-on le
constater. Reste que ce mouvement dexternalisation est très différencié selon les
secteurs et demeure marqué par un certain nombre dinfirmités. Au-delà de son
caractère embryonnaire, Il convient de se demander si la dynamique à luvre
conduira à terme à la généralisation de lexternalisation des fonctions de
régulation dans tous les secteurs de lactivité économique (eau,
transports
), ou si des différences marquées entre secteurs daction publique
ont vocation à être pérennes.
Sous un autre angle, il faut garder à lesprit que les agences de régulation
peuvent également être analysées comme un instrument de lÉtat pour parvenir à
ses fins par dautres moyens ou pour remplir certaines de ses missions dans un
contexte où sa légitimité à intervenir directement est remise en cause. Le subtil
dosage « dindépendance » et de contrôle des agences apparaît alors comme un
élément clé dune stratégie dÉtat qui viserait à préserver (ou à
restaurer) sa capacité daction en externalisant partiellement la fonction de
régulation pour la (re)légitimer. La position dominante de lacteur étatique ne
saurait faire perdre de vue le fait que lanalyse de lÉtat régulateur amène
à sinterroger sur les frontières de lÉtat et sur son interpénétration
avec dautres types dacteurs ou dinstances (Jessop, 1990 : 173).
Lapproche en termes de régulation constitue une novation en regard du schéma
camerounais traditionnel dadministration qui fait aboutir au ministère et soumet au
contrôle gouvernemental lensemble des administrations de lÉtat, non sans
conduire à une pratique de détermination régalienne de lintérêt général.
Lintérêt que présente ces institutions au regard des principes traditionnels
dorganisation étatique ne saurait être sous-estimé malgré leur faiblesse
structurelle et opératoire. Dabord, elles donnent à voir un « État pluriel »,
fait dune mosaïque dentités très diverses, formé dun ensemble
déléments hétérogènes : structures « hors machine », elles constituent des «
îlots » à part dans lÉtat et elles sont portées à renforcer leur autonomie, en
jouant de la compétence et de lautorité de leurs membres (Chevallier, 2004 :
473-482). Ensuite lémancipation par rapport aux contraintes bureaucratiques est
assortie dun processus corrélatif dintégration au milieu : chacune de ces
agences est amenée plus ou moins à intérioriser la rationalité du secteur quelle
est chargée dencadrer et de réguler. Enfin, à travers elles, cest
dune remise en cause de la conception westphalienne de lÉtat quil
sagit. Ce processus est au cur de la transformation de lÉtat qui est de
moins en moins en mesure dagir de façon autonome du fait de la multiplication des
acteurs et des niveaux de laction publique. LÉtat agit de plus en plus en
interaction dans le cadre dun processus de construction collective de laction
publique et non de production étatique des politiques publiques (Hassenteufel, 2007 :
313).
Ce qui est en jeu dans cette nouvelle forme daction étatique ou bien cette
recomposition étatique, cest évidemment la place même de lÉtat dans la
société et léconomie ainsi que la délimitation de la sphère publique et du
rôle de lÉtat. La nouvelle dynamique à luvre se traduit par la
redéfinition du rôle de lÉtat dans un sens moins interventionniste : on assiste
de plus en plus à un desserrement de lÉtat (Le Galès, 1999 : 627-652).
À linverse, on peut se demander si la figure de lÉtat régulateur ne va pas
au-delà du domaine économique, en résumant et en condensant les nouvelles fonctions
imparties à lÉtat dans la société.
II - LÉtat régulateur comme renouveau de laction publique : les
enjeux de la « bonne » gouvernance
La notion de régulation prend très au sérieux celle de la gouvernance. Les deux termes
sont aujourdhui indissociables, particulièrement dans le domaine du développement,
où ils structurent les conceptions du cadre politique des sociétés et inspirent des
projets de réforme de lÉtat. Le vocabulaire spécialisé et très évolutif de la
gouvernance sous toutes ses formes sest profondément diffusé au point de devenir
un leitmotiv dans tout document officiel (Darbon, 2003 :135-152) ou discours politique au
Cameroun. Partenariat, réseaux, acteurs sociaux deviennent des concepts qui se
substituent à la vieille idée de prise de décision souveraine top-dow au nom de la
puissance publique (Arnaud, 1998 : 147-175). Par-delà les équivoques que recèle le
vocable, et quil convient dexposer au préalable, il nen est pas moins
susceptible déclairer certaines des mutations que connaît actuellement
lÉtat au Cameroun.
A - Considérations générales sur la gouvernance : sociogenèse dun
concept
La gouvernance nest pas une idée neuve. On en trouve des traces dans le latin
médiéval : gubernantia renverrait aux idées de conduite, de pilotage, de direction.
Cette notion renvoie au processus de coordination dacteurs, de groupes sociaux et
dinstitutions, en vue datteindre des objectifs définis et discutés
collectivement. Lintérêt actuel pour ces questions de gouvernance répond à la
transformation du rôle de lEtat et des modes de régulation politique qui sy
attachent.
La « gouvernance » est devenue depuis les années 1990 le mot fétiche, censé condenser
et résumer à lui seul lensemble des transformations qui affectent lexercice
du pouvoir dans les sociétés contemporaines : promue à tous les niveaux et dans les
organisations sociales de toute nature, la gouvernance affecte lÉtat, en remettant
en cause ses modes demprise sociale et, au-delà, les assises de son institution, en
le restructurant ; la substitution aux techniques classiques de « gouvernement » des
méthodes nouvelles de « gouvernance » serait indissociable dun ébranlement
profond dun modèle étatique, emblématique de la modernité.
Les questions de gouvernance sinscrivent dans une analyse des restructurations de
lEtat et de laction publique (mais aussi, plus généralement de la
régulation économique, sociale et politique). Si la présence du terme gouvernance est
aujourdhui particulièrement nette, la quête du sens exact de ce concept reste
difficile7 tellement il est chargé déquivoques et entouré dune « gangue
idéologique », quil donne lieu à des usages hétéroclites8. Tout se passe comme
si la gouvernance avait été victime de son succès, en devenant un de ces concepts
omnibus, qui en est venu à recouvrir des significations extrêmement diverses. Parfois,
le terme tend à être utilisé comme une simple facilité de langage : parler de «
gouvernance » plutôt que de « gouvernement » ou de « politique » permet
dactiver les connotations positives qui sattachent au vocable ; laction
engagée est symboliquement placée sous le signe de la modernité et de
lefficacité.
On retrouve ici le problème classique de limbrication du monde des paradigmes
scientifiques et de lunivers des représentations idéologiques :
lidéologisation des paradigmes scientifiques, construits par les chercheurs dans le
cadre de leur activité professionnelle, cest le moment où ces paradigmes tombent
dans le domaine public, en servant de point dappui au discours politique, qui
acquiert par ce biais une aura de scientificité. Ce concept se présente ainsi comme un
de ces « concepts migrants », vis-à-vis desquels les chercheurs sont conduits à
prendre leurs distances, parce quils font lobjet dune utilisation non
critique et servent à conforter les certitudes sociales.
Cette distanciation apparaît en lespèce dautant plus opportune que le
concept de gouvernance a émergé au cours des années 1990 comme paradigme scientifique
et comme référentiel politique : il a été demblée chargé dune dimension
normative et prescriptive, en servant dargument dautorité et, de moteur de
changement.
Le concept de gouvernance a progressivement gagné la plupart des sciences sociales dans
les années 1990. En sciences économiques, il permettra dans la perspective
institutionnaliste ouverte par lEcole de Chicago, de formaliser les mécanismes
assurant la coordination des activités économiques, notamment au sein de
lentreprise, autrement que par léchange ou la hiérarchie. En théorie des
relations internationales, il servira, à partir de louvrage pionnier coordonné par
J.-N. Roseneau et E.-O. Czempiel, à rendre compte des nouvelles formes
dorganisation dune société internationale de plus en plus fragmentée et
hétérogène. En science politique, il visera à théoriser le mouvement de repli
dun État devenu « creux » Hollow State (Peters, 1993) et confronté
à la montée en puissance dautres acteurs, publics et privés, internes et
externes, qui entendent peser sur les choix collectifs et avec lesquels il est devenu
nécessaire de composer. La gouvernance constitue aussi un puissant moteur de réforme qui
alimente la croyance en la nécessité de la promotion, à tous les niveaux et dans les
domaines de la vie sociale, de nouvelles méthodes de décision et daction. Trois
formules témoignent de lemprise de cette nouvelle logique : la Corporate Governance
(la gouvernance dentreprise), qui vise à construire un nouveau management, reposant
sur linteraction entre les différents pouvoirs existant au sein de
lentreprise, et en tout premier lieu celui détenu par les actionnaires et les
dirigeants ; la Good Governance (la bonne gouvernance), prônée par les organisations
financières internationales comme moyen de réforme des institutions des pays en
développement, la « gestion saine du développement » exigeant, selon la Banque
mondiale, « linstauration de normes et dinstitutions assurant un cadre
prévisible et transparent pour la conduite des affaires publiques et obligeant les
tenants du pouvoir à rendre des comptes »9.
Le rôle des institutions financières internationales sera déterminant dans la
définition de ce que doit être la « bonne gouvernance ». Du reste, lexplosion de
lengouement actuel pour ce mot-valise (Gaudin, 2002 : 9) est le fait des grandes
agences internationales de laide au développement, de la Banque mondiale en
particulier. Son registre dénonciation varie dun organisme à lautre.
Ainsi, ont pu voir le jour des formulations tantôt savantes tantôt impératives pour
traduire la « bonne gouvernance ».
Au détour des rapports de ces agences et bailleurs de fonds, ce concept figure sous des
formulations variées considérées soit comme une injonction faite aux pays en voie de
développement à se plier à de sévères plans dajustement structurel allant de
pair avec la privatisation de certaines fonctions régaliennes et une promotion du rôle
de la « société civile », soit de manière subtile comme une recommandation. Il
ressort du document issu du sommet du G 8 de juin 200210, où se manifeste le propos des
pays riches de concentrer leur appui « sur les pays qui se montreront attachés
politiquement et financièrement à la bonne gouvernance et à la primauté du droit, qui
investiront dans leur capital et qui poursuivront des politiques propres à stimuler la
croissance économique et à réduire la pauvreté »11. De plus en plus, la prescription
peut même se transmettre sur le ton paternel de lheureuse révélation de nouvelles
« stratégies de réduction de la pauvreté ». Formulations plus savantes ou plus
impératives, ces variations de style ne changent pourtant rien sur le fond. Le concept de
« bonne gouvernance » en matière de développement demeure le plus incertain de tous,
caractérisé par ses éléments périphériques plutôt que par un quelconque noyau
dur12. La popularité de la notion de gouvernance dans le registre discursif des élites
dirigeantes africaines, montre bien le potentiel quelle recèle en termes
dinstrumentalisation, y compris de lutilisation idéologique qui en est faite
dans la perspective néolibérale pour discréditer lEtat, et fabriquer les recettes
dune « bonne gouvernance ».
B - Les usages de la bonne gouvernance : des divergences de rationalité à la
construction dun consensus
Une bonne partie de la littérature existante montre le rôle croissant des acteurs
supranationaux (Banque mondiale, FMI, clubs créanciers) et infranationaux dans la
production et limplémentation des politiques publiques. Leur poids est tel
quil devient désormais très difficile délaborer laction publique sans
faire référence aux mesures et aux recommandations faites par les acteurs transnationaux
notamment (Smith, 2008 : 197-214).
Ce processus se caractérise par leffacement des frontières nationales dans la
construction de laction collective. Cet effacement résulte dun double
mouvement, en partie interdépendant, de supranationalisation (régionalisation,
mondialisation) et dinfranationalisation des politiques publiques, traduit ainsi un
« desserrement du verrou de lÉtat » et une remise en question de la conception
westphalienne de ce dernier.
Dans le discours des bailleurs de fonds internationaux du Cameroun, limpératif de
la « bonne gouvernance » est envisagé dans une perspective fonctionnaliste
(Enguéléguélé, 2005 : 133-153). Prenant acte de la faillite ou de la crise de
lÉtat centralisé postcolonial, ces entrepreneurs de cause considèrent désormais
la gouvernance comme lunique mode pertinent de régulation politique. Elle est
conçue comme le gage du développement en ce sens quelle permet la participation
des acteurs non gouvernementaux au processus de prise de décisions (Peters, 2000 : 197).
La promotion des initiatives issues du monde associatif, couramment nommé « société
civile », se coule dans ce modèle ; il en va de même pour la décentralisation.
Lensemble de ces dispositifs donne tout son sens à la problématique de la
gouvernance, qui saccorde avec la vision dune symbiose de multiples pôles de
décision et de contrôle, non seulement étatiques, mais aussi décentralisés
(collectivités locales, ONG) et supra étatiques (intégration régionale, agences de
coopération et aide internationale).
Daprès les acteurs internationaux, le référentiel de « gouvernance13 » implique
un mode de gouvernement dans lequel la mise en cohérence de laction publique
(construction des problèmes publics, des solutions envisageables et des formes de leur
mise en uvre) passe par la mise en place de formes de coordination multiniveaux et
multi acteurs dont le résultat, toujours incertain, dépend de la capacité des acteurs
publics et privés à définir un espace de sens commun.
Doù limportance non seulement de la dilution des frontières entre public et
privé, mais surtout celle des mouvements sociaux, des acteurs associatifs, souvent en
articulation avec les partis politiques et des syndicats, dans la production des
principaux compromis sociaux à lorigine des politiques (Tarrow, 1989), ainsi que le
rôle de lopinion dans la construction collective de laction publique.
Si ce terme a rapidement été réduit dans le débat public camerounais à la
problématique de ladhésion des gouvernants au principe de responsabilité
(accountability) dans une perspective normativiste, il recouvre surtout pour les
partenaires financiers du pays la question de la définition de nouveaux paradigmes
daction publique dans des contextes internes et internationaux en profondes
mutations. Il y aurait ainsi gouvernance dès lors que les « coalitions formées de
représentants des différents secteurs de la société (secteur privé, public et
société civile) sont engagées à la réalisation dactions concrètes dans le
cadre de partenariat »14. Laction publique serait ici guidée par une approche
pragmatique et expérimentale allant du « bas vers le haut » (bottom/up model focus)
plutôt que tournée vers lapplication de décisions prises par les instances
hiérarchiques traditionnellement compétentes selon une logique du « haut vers le bas »
(top/down model focus) qui a longtemps caractérisé les prétentions de lÉtat
wébérien en matière de politiques de développement et qui est lune des
principales raisons de son échec.
Le récit de la bonne gouvernance constitue une remise en cause des règles et des
manières de faire constitutives et héritées de lordre wébérien. La diffusion de
ce nouveau vocabulaire et le recours systématique aux instruments directement repris du
New public Management constituent désormais une donnée factuelle incontournable (Bezes,
2008 : 215-253). Dans le processus délaboration des réformes, les hauts
fonctionnaires des finances, de la fonction publique, les membres des cabinets
ministériels puisent largement dans le stock des recettes de la gouvernance. Profil
demploi, poste de travail sont désormais les nouveaux enjeux de la réforme
administrative ; les propriétés les plus constitutives de ladministration ont
été exposées à des projets de réforme radicale.
Pour les autorités nationales limpératif de gouvernance fonctionne comme une
ressource mais aussi comme une contrainte. Ces autorités en font usage pour justifier et
renforcer des stratégies de repositionnement dans lespace public en tant
quacteur central dans sa mise en uvre.
La mise en uvre de la gouvernance correspond à un processus dappropriation du
programme par les acteurs nationaux (locaux) et se traduit, en définitive, par
lapprentissage de nouvelles normes et de nouveaux répertoires daction par ces
différents acteurs au travers des mécanismes de socialisation tels séminaires,
colloques
Lappropriation par les acteurs nationaux de la nouvelle grammaire de laction
publique que constitue la gouvernance va donner lieu à une activité dadaptation
institutionnelle qui met en évidence limpact des formes et des principes de la
gouvernance sur les structures administratives nationales. Limportante activité de
production normative à laquelle les pouvoirs publics se sont livrés dans le cadre de la
mise en uvre du processus de décentralisation, lun des enjeux majeurs de la
gouvernance, est éloquente.
Sur le plan législatif, il sagit des lois n° 2004/017 dorientation de la
décentralisation, n° 2004/fixant les règles applicables aux communes, n° 2004/019
fixant les règles applicables aux régions toutes du 22 juillet 2004, des lois n°
2006/004 et 2006/005 fixant respectivement les modes délection des conseillers
régionaux et des sénateurs. Ce sont également des instruments juridiques tels la
circulaire n° 001/CAB/PM du 11 janvier 2008 du Premier ministre relative à la prise en
compte de la décentralisation dans les stratégies sectorielles, les décrets n°
2008/013 et 2008/014 du 14 janvier 2008 du Président de la République portant
organisation et fonctionnement du Conseil national de la décentralisation (CND) et du
Comité interministériel des services locaux (CISL) respectivement15. Ces deux dernières
structures notamment le CND et le CISL, sont chargées du suivi et de lévaluation
de la mise en uvre de la décentralisation pour le CND ; de lélaboration du
programme des transferts de compétences et des ressources, de lévaluation des
moyens humains et matériels nécessaires à lexercice des compétences
transférées, de lévaluation du coût des charges transférées et de la
formulation des propositions des modalités de financement desdits transferts par
lÉtat, en ce qui concerne le CISL.
La réception institutionnelle de ce nouveau récit se traduit ensuite par la mise en
place dun organe en charge de la gouvernance notamment le Programme national de
gouvernance (PNG) rattaché à la primature avec pour mission la refondation de la
stratégie de développement économique et social du Cameroun. Cet acte est significatif
dun volontarisme politique. Cest tout à la fois un geste symbolique
daffirmation au plus haut niveau du nouveau paradigme, et une décision qui produit
des effets considérables dans la fabrique et la mise en uvre de laction
publique, mais aussi sur le comportement des acteurs économiques et sociaux. Elle se
traduit aussi par la création au sein de chaque département ministériel dun
comité de suivi et de mise en uvre des réformes contenues dans le programme
national de gouvernance ou par lorganisation fréquente des séminaires et ateliers
dimprégnation de ce nouvel outil de modernisation tant au niveau sectoriel
quau niveau interministériel. Pour les pouvoirs publics, Il sagit de doter
lÉtat des moyens lui permettant de faire face aux défis de la mondialisation16 en
adoptant comme nouveau récit de laction publique des référentiels tels :
compétitivité, rentabilité, accountability, décentralisation, partenariat secteur
public/secteur privé/société civile, État de droit, gestion participative
Lappropriation passe aussi par la mise en place des structures parallèles aux
services administratifs traditionnels. Cest ainsi que la gouvernance économique,
précisément dans sa composante partenariat secteur public/secteur privé sest
traduite par la création des cadres et instruments de concertation tels le Comité
interministériel élargi au secteur privé (CIESP), le Conseil du partenariat industriel
(CPI), le Conseil de régulation et de compétitivité. Situées en dehors des
administrations publiques, ces structures de caractère hybride constituent lun des
éléments de mise en uvre nationale de la gouvernance comme modèle
dadministration.
Lappropriation se traduit par un travail important sur le sens de la politique de
mise en uvre des réformes induites par la gouvernance. À coup de réunions,
séminaires, ateliers dimprégnation mettant en présence acteurs supranationaux
nationaux, locaux, on a pu voir se constituer une sorte de référentiel daction
collective (Muller, 1996 : 299-314) compatible avec les exigences de la bonne gouvernance
tout en exprimant le vécu et les préoccupations des acteurs intéressés : une
véritable approche par les policy networks (Le Galès & Thatcher, 1995). Cette
approche, qui témoigne de la convergence des paradigmes étatistes et pluralistes,
sest développée à partir de la notion de « réseau de politiques publiques »
(policy network). Elle permet de mieux prendre en compte la multiplication et la
diversification des acteurs participant à la politique régulationniste, à la
sectorisation et à la décentralisation de lÉtat, à laffaiblissement des
frontières entre le public et le privé, à limportance croissante des acteurs
transnationaux (Kenis et Schneider, 1991). À titre dillustration nous pouvons
mentionner au niveau de la gouvernance locale, les séminaires et colloques à
leffet de renforcer les capacités managériales et de leadership des acteurs de la
décentralisation (novembre 2007 ; mars 2008 ; avril 2008). Acteurs présents : bailleurs
de fonds, administration publique concernée, maires, représentants de la société
civile, experts. Par ce procédé, les acteurs nationaux et locaux se socialisent au
nouveau récit. En sappropriant et en revendiquant à leur manière les implications
du nouveau récit lutte contre la corruption, transparence, lutte contre la
pauvreté, ces acteurs réinvestissent les registres de la gouvernance et de la
modernisation. Une lecture du nouveau statut de la fonction publique camerounaise
réformée conforte cette affirmation. Loption de postes de travail y est
privilégiée avec pour corollaire la mise sur pied dun système dévaluation
des personnels aux résultats ; lenjeu ici étant celui de la recherche de
lefficacité et du rendement. Ladministration y est repensée sous le signe
des mécanismes néo managériaux avec des objectifs précis. Lélaboration de ce
référentiel réformateur est révélatrice dun processus de conversion
idéologique de ladministration camerounaise au nouveau récit. Lenjeu étant
ici celui de la capacité des acteurs nationaux et locaux à produire de nouveaux récits
sur la gouvernance dans une dimension identitaire. En ce sens, la gouvernance en tant que
nouveau référentiel, constitue bien une contrainte pour les pouvoirs publics, parce
quil transforme leur perception du monde vécu et disqualifie les anciennes visions
du monde.
Toutefois, on peut observer des mécanismes de path dependence ou dépendance au sentier
(North, 1990) à travers lesquels les visions jusquici dominantes tendront à
imposer leur capacité à rendre compte du monde et donc à freiner lémergence de
nouveaux récits issus de la mécanique de la réforme. À cet effet les autorités
camerounaises nont eu cesse dinvoquer largument de la préservation de
lunité nationale et de léquilibre social pour justifier les lenteurs
intervenues dans la mise en uvre des structures de décentralisation qui attendent
de voir le jour malgré la production dun impressionnant arsenal juridique et la
multiplication des actions symboliques (Edelman, 1971 : 66) telles que séminaires,
colloques
Le registre de spécificités contextuelles est mobilisé pour justifier cette lourdeur
procédurale ; daucuns ne sempêchent pas de considérer la décentralisation
comme un vecteur pouvant favoriser lémergence des forces centrifuges dans un État
en construction. Le discours tenu sur la menace dexplosion que ferait peser la
décentralisation sur lunité nationale dissimule mal la vision jacobine et la
préférence pour la déconcentration qui sont les marques déposées des pouvoirs publics
au Cameroun en matière dorganisation territoriale du pays depuis son indépendance
(Sindjoun, 2002 : 156-183.). Ces dernières participent dun souci constant de
maintien voire de renforcement de lemprise sur les discours et du contrôle exercé
sur les populations au nom des impératifs de lintégration nationale et du
développement local équilibré, ce que confirme lextrême prudence observée par
le gouvernement dans le processus de décentralisation engagé avec la loi 2004/017 du 22
juillet 2004. En attendant dêtre effective, la décentralisation existe plus au
niveau des effets de discours et de la manipulation des idées (Muller, 2005 : 155-187).
Le paradigme centralisateur continue à spécifier la construction de la démocratie
locale au Cameroun.
Limplémentation de cette nouvelle recette est sous-tendue par des considérations
stratégiques dadaptation et de réinterprétation. En effet, les multiples formes
de gouvernance ne peuvent être appliquées sans aménagements, échéanciers, arbitrages
et compromis qui donnent aux pouvoirs publics le rôle dacteur central dans leur
mise en uvre. Concernant la démocratie de proximité processus de
décentralisation/régionalisation qui valorise les territoires locaux et les initiatives
de proximité -, les autorités camerounaises ont une vision sélective ; daprès
elles, la mise en place de cette dernière ne doit pas se traduire par « un simple
placage des techniques européennes et occidentales », mais, « être réfléchie et
adaptée à la situation particulière de (notre) pays ». Limpératif participatif
que recouvre la démocratie de proximité doit sans doute entraîner une association
étroite des populations locales à la gestion des affaires qui relèvent de leur
quotidien ainsi quun « dialogue constant entre le pouvoir et la base qui suscitera
la participation du plus grand nombre à la gestion des affaires publiques locales »17.
Pour les pouvoirs publics, lapproche en termes de cogestion doit sopérer
notamment lors « des élections reconnues constitutionnellement comme mode de
désignation des responsables et dexpression des citoyens, tant au niveau communal
quau niveau régional ». Bien plus, les réformes induites par ce récit officiel
et « mythique » de bonne gouvernance, sont bien souvent des réformes à dimension
politique utilisées par les pouvoirs publics pour modifier la balance de pouvoirs et
affirmer un nouveau rôle (Saint-Martin, 2000). Dans cette perspective, les réformes
sinscrivent dans un schéma marqué par une évolution graduelle, par un mécanisme
de petits pas que constitue le principe central de lapproche incrémentaliste. Elles
sont fortement orientées par les politiques, les valeurs et les comportements de
centralisation en vigueur.
Conclusion
LÉtat régulateur témoigne bien dune véritable refondation de lÉtat
westphalien. Cette mise à nu de lÉtat (Hassenteufel, 2007 : 311-329) à partir de
lanalyse de laction publique correspond au passage dun Welfare State
keynésien, dans le cadre duquel les politiques publiques sont caractérisées par
laugmentation du niveau de bien-être, à un Workfare State schumpétérien,
orienté vers le renforcement de la compétitivité et ladaptation flexible au
marché (Jessob, 1994). Dans une série de domaines, les instruments contractuels et
consensuels tendent à se substituer aux techniques unilatérales classiques, manifestant
le basculement vers une « gouvernementalité coopérative » (Serverin & Berthoud,
2000). Ce nouveau style daction publique permet dobtenir la contribution
active des partenaires privés à laction publique, et de créer un cadre stable de
coopération entre acteurs porteurs de rationalités divergentes. Cette construction
collective de laction publique a pour conséquence déroder les frontières
entre publics et privé, comme lexprime la notion de gouvernance qui, en plaçant
sur le même plan ces deux catégories dacteurs, vise à rendre compte des
différentes modalités dinteractions entre publics et privés pour résoudre des
problèmes collectifs (Koimann, 2003). Le recours croissant aux acteurs supra et
infra-étatiques dans la construction collective de laction publique sinscrit
dans une dynamique plus large de privatisation qui correspond non seulement à une
dé-différenciation de lÉtat par les politiques publiques, mais aussi à sa
désinstitutionnalisation. Toutefois, lÉtat garde sa centralité dans cette
transformation liée aux exigences du marché. Loin dassister à un retrait ou une
disparition de lÉtat, on assiste à une sa recomposition. La notion dÉtat
régulateur, permet ainsi darticuler la dé-différenciation de lÉtat en
termes de perte de capacité daction autonome, et sa re-différenciation en termes
de capacité de pilotage et de contrôle accru des politiques publiques.
Notes
1. Cette étude a bénéficié de mes échanges avec MM : Luc Sindjoun, Dominique
Darbon et Andy Smith, quils en soient remerciés.
2. « Par gouvernementalité, jentends lensemble constitué par les
institutions, les procédures, analyses et réflexions, les calculs et les tactiques qui
permettent dexercer cette forme bien spécifique, bien que complexe, de pouvoir, qui
a pour cible la population, pour forme majeure le savoir
», cf. Michel Foucault,
Dits et écrits, vol. III, Paris, Gallimard, p. 655.
3. HEVECAM= Hévéas du Cameroun ; CDC= Cameroon Development Corporation ; SODECOTON=
Société de Développement du Coton
4. Pour un aperçu sur ce concept, cf. Barry M. Mintnick, 1980, The Political Economy of
Regulation. Creating, Designing and Removing Regulatory Reforms, New York Columbia
University Press.
5. Cest le cas de lagence de régulation du secteur de lélectricité
dont les activités sont financées par les moyens mis à sa disposition par
lentreprise régulée à savoir Aes-Sonel. Voir <http://www.camerounlink.net>
(consulté le 30 avril 2008).
6. Lapplication de ces mesures entraînera des actions de protestation des autres
entreprises et de lensemble des consommateurs.
7. Pour Jean-Pierre Gaudin, « le mot lui-même fait problème. Il résonne de manière
douce et presque caressante, mais névoque souvent rien de précis », Pourquoi la
gouvernance ?, Paris, Presses de Sciences Po, 2002, p. 10
8. Sur le concept de gouvernance, cf. D. Osborne & T. Gaebler, Reinventing Government,
Mass., Addison-Wesly, Readings, 1992 ; J. N. Rosenau & Ernst-Otto Czempiel (eds),
Governance without Govrnment : Order and Change in World Politics, Cambridge, New-York,
Cambridge University press, 1992 ; A. Kizancigil, « La gouvernance, itinéraires
dun concept », in J. Santiso (ed.), À la recherche de la démocratie : Mélanges
offerts à Guy Hermet, Paris, Karthala, 2002, p. 22.
9. Rapport «Governance and Development», 1992.
10. Voir le document intitulé Plan daction pour lAfrique du G 8.
11. Le Monde, 29 juin 2002, p. 4.
12. The Economist, «Good governance », du 15 juin 2002, p. 81-82.
13. Dont la polysémie a par exemple été soulignée par R. A. W. Rhodes, « The New
governance : governing without government », Political Studies, 44 (4), 1997, pp.
652-667.
14. Voir sur ce point les rapports de la Banque mondiale sur les politiques de
développement, Banque mondiale, 1994 : 113, et 1997.
15. Allocution du ministre de lAdministration territoriale et de la
décentralisation lors du lancement officiel de la deuxième phase du Programme
dappui à la décentralisation et au développement local (PADDL II), le 9 avril
2008 à Yaoundé.
16. Voir le document du Programme national de gouvernance 2006-2010.
17. « Mémorandum sur la bonne gouvernance et les droits de lhomme au Cameroun »,
document du Programme national de gouvernance, Yaoundé, octobre 2000 : 2.
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